Elisa, une de nos anciennes étudiantes, témoigne de ses expériences de la vie danoise.

Bonjour, lecteurs français.

J’espère que tout va pour le mieux pour vous et me réjouis de la connexion que nous sommes sur le point de créer : moi qui écris et vous qui prenez le temps de me lire. Je rédige cette lettre de Vejstrup, un village au sud de la Fionie. Dans cet espace-temps, nous sommes le samedi 5 mars 2022, il fait 5°C et quelques nuages blancs tachent le bleu du ciel. Je me dis qu’il faudrait vite aller se balader avant que le soleil ne s’en aille. Mais d’abord, je vais vous raconter les quelques 850 jours que j’ai passés au Danemark.

Mon aventure avec ce pays ne débute pas en novembre 2019, date à laquelle j’ai obtenu ma carte jaune (sorte de carte d’identité danoise), mais bien des années auparavant. Mon beau-père est danois. Petite, je passais parfois quelques semaines dans son pays natal. Toujours en été, toujours en vacances. Mes premiers contacts avec la culture danoise se sont faits à travers la famille et les amis. Et j’en ai eu une très bonne impression. Alors, en 2019, mon master dans la poche (merci mes profs de l’Université de Strasbourg et de Savoie) et l’enthousiasme chevillé au corps, je quitte la France. Je veux découvrir le monde et changer d’air. Je fais alors la connaissance de l’air frais scandinave : mordant, sec, parfois glacial, mais délicieusement léger et marin.

J’arrive en Fionie en hiver. Les jours sont courts. Très courts. La nourriture a un drôle de goût pour mes papilles françaises mais il y a des gløgg (vins chauds) dans chaque café, donc ça va. Pendant deux mois je prends mes repères et en janvier 2020, je m’installe dans une højskole. Les højskole ce sont ces « écoles du peuple » dans lesquelles les élèves choisissent des activités pour développer leurs savoir-faire et leur personnalité. Ma højskole se situe dans le petit village de Brenderup, toujours en Fionie. La moitié des étudiants viennent des quatre coins du monde, les autres des quatre coins du Danemark. Je vais vivre avec eux pendant six mois, ou presque. Je choisis d’étudier la musique, le danois, l’ébénisterie, le feutre et la vannerie. Nos professeurs sont danois et notre train de vie aussi. On chante ensemble chaque matin, on fait soi-même le ménage dans l’école et on soupe à 18h. On mange très tôt, ici… Il va sans dire qu’on s’amuse bien et qu’apprendre sans système de notation est un vrai plaisir. Mais tout a une fin et le semestre s’achève prématurément avec le confinement. Par ailleurs, les étudiants internationaux – dont je fais partie – sont autorisés à rester dans l’école. Nous passons alors plusieurs semaines en semi-autogestion.

Au début de l’été, je quitte l’école et me connecte sur jobnet.dk pour trouver un emploi. Mon danois est tout juste bon pour faire les courses mais je ne me décourage pas. Je trouve vite un poste comme serveuse dans un restaurant à Middelfart, Fionie. Avec mes collègues, nous parlons en anglais mais avec les clients, c’est danois. En parallèle, avant mes soirées au resto, je suis des cours de danois trois fois par semaine. Au Danemark, le gouvernement organise des cours de langue gratuits pour les nouveaux arrivants. Mon danois s’améliore. Même assez vite. Bien sûr, je fais quelques jolies bourdes. Un jour, plusieurs tablées au restaurant explosent de rire quand je demande à un client s’il veut un nouveau genou au lieu d’un nouveau couteau (knæ / kniv, vous voyez). Petite aparté, le temps devient vraiment g, comme on dit ici, je hâte mon récit avant la pluie.

Vivre seule dans une ville danoise peut vraiment être exaltant et triste à la fois. Hormis le blues de l’expat’, il n’est pas toujours facile de faire de nouvelles connaissances et les Danois en hiver ne sont pas des plus sociables (après le boulot, ils rentrent vite à la maison pour se faire des sessions de hygge – je crois que nous n’avons plus besoin d’expliquer ce terme). Mais quand on se fait des amis ou quand on comprend enfin une conversation entière, alors là, c’est le pied ! Bref, les jours passent, je me fais un petit cercle d’amis et je vois mieux ce que le Danemark peut m’offrir. Je décide alors de déménager à Svendborg – et oui, encore en Fionie –, de changer de boulot et de me lancer dans une carrière freelance de rédactrice-correctrice. Pendant les vacances de Noël, une efterskole (sorte de højskole pour les mineurs, cette fois) me contacte pour m’offrir un poste de professeure de français. Mon danois n’est pas encore au top mais j’accepte. Après tout, c’est le français que je vais enseigner, non ? Et puis je cherche un appartement à partager avec une ancienne camarade de classe (la højskole de Brenderup, vous vous souvenez ?). Quand je ne travaille pas, je profite de l’excellent réseau de transport en commun du pays. Je me rends beaucoup à Middelfart où mon compagnon habite (oui, il est Danois). La vie suit son cours et je dois dire que la vie est facile ici. Les chocs culturels sont souvent amortis par le calme et la sérénité scandinave. Et chaque jour apporte son lot de surprises, de découvertes et de fous rire.

Il y a encore un peu de soleil, je vous abandonne pour vite profiter de sa chaleur. Embrassez Strasbourg pour moi et merci pour votre lecture.

Med venlig hilsen

Elisa